Bénabar : «J’aime raconter l’inattendu»

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Son 8e album, «Le début de la suite»,sort aujourd’hui vendredi. L’occasion pour Bénabar, après quatre ans de maturation, de «tout revoir à zéro»…sans pour autant abandonner son goût pour la chronique sociologique et humoristique.

Dans le monde de Bénabar, on trouve une vendeuse et un vigile, un marathonien et un chauffard, un sédentaire et des «chevaliers sans armure». Autant de personnages du quotidien, de ceux auxquels on accorde peu d’importance mais que le chanteur dessine à la manière de Sempé, d’un trait vif et légèrement décalé. Bénabar a beau nous recevoir dans un hôtel moderne avec vue époustouflante sur la Tour Eiffel, son univers n’a pas grand-chose à voir avec les quartiers chics et les icônes touristiques. Il vient de la banlieue sud (Corbeil, précise-t-il) et vit désormais dans la banlieue est (il ne nous dit pas où). Parce que l’idée d’être de l’autre côté du périph lui plaît. Et parce que pour les enfants, «c’est quand même mieux».

Votre précédent album remonte à 2014. Entre-temps, vous vous êtes notamment consacré au théâtre. Que retirez-vous de cette expérience ?

J’avais déjà eu un avant-goût en 2011 aux côtés de Jacques Weber. Cette fois-ci, j’étais sur scène avec une pièce que j’avais coécrite. Le point de départ, c’était cela : le plaisir de l’écriture. Il n’était pas question que je joue. Et puis je me suis jeté à nouveau dans le grand bain du théâtre, de façon empirique. Pour une parenthèse qui a duré un an. Cela m’a fait du bien de m’éloigner un peu de la musique. De penser à de nouvelles chansons sans impératifs de date ; détendu, un peu en dilettante.

Durant cette période, on vous a vu aussi jouer un rôle grandissant au sein des Restos du cœur…

Cela a été très exagéré. Jean-Jacques Goldman n’était plus là donc tout le monde a mis la main à la pâte. Je n’ai rien fait de plus : je me suis rendu disponible. Je n’avais pas d’autorité particulière sur la chose. Soyons pragmatiques : le seul but des Restos est de récolter de l’argent pour ceux qui n’en ont pas assez. Le reste est accessoire et les polémiques hors sujet.

Vos paroles restent celles d’un chroniqueur du quotidien…

J’aime raconter des choses qui me touchent par le biais de l’inattendu, inventer des situations, ceci de façon très structurée. De ce côté-là, je reste dans la tradition de la chanson française. Je cherche à évoluer, oui, mais sans me déguiser.

La première chanson de l’album lui donne son nom. «Le début de la suite», c’est pour dire que vous revenez pour un nouveau chapitre ?

Oui, mais pas seulement. La formule me plaît bien : elle montre d’une volonté d’optimisme alors que, comme les autres, je me sens touché par la dureté du monde. Je pense qu’il faut toujours essayer d’améliorer les choses.

Dans ce registre, l’artiste a-t-il une mission encore plus essentielle aujourd’hui qu’hier ?

Je crois au poids social de la musique mais pas dans celui de l’artiste. Même si son rôle n’est pas négligeable : il va vers les gens, il les réunit. La fraternité qu’on ressent lors d’un concert, c’est quand même important ! Cela se fait avec le public : le type qu’on écoute religieusement nous chanter ses morceaux impérissables, je trouve ça chiant.

Album « Le début de la suite » (Jive Epic/Sony Music). Bénabar en concert au Zénith de Toulouse mercredi 28 novembre à 20 heures Tarifs : de 35 € à 58 €. Tél.05 62 73 44 77 (www.bleucitron.net).


«Mes Coups de cœur»

Avant sa tournée, Bénabar devrait tourner un film qu’il a coécrit avec le réalisateur Hector Cabello Reyes. Pas de titre pour l’instant mais «une histoire de famille autour d’un gendre que j’interprète», explique-t-il. Dans cette comédie «marrante et tendre», Josiane Balasko et Didier Bourdon incarneront les beaux-parents. Fou de ciné, Bénabar a beaucoup aimé « The Square», Palme d’or à Cannes l’an dernier qu’il a vue récemment en VOD. «J’ai adoré ce personnage de beau mec, un peu Cary Grant, dépassé avec ses lâchetés et ses zones d’ombre.» Côté livres, le chanteur s’est «plongé avec bonheur» dans «Les illusions perdues», de Balzac. «J’adore le style, ce que ça raconte, cette intelligence : je suis envoûté». Question chanson, Bénabar cite Grand Corps Malade, Eddy de Pretto et Orelsan, reconnaissant qu’il lui faut «au moins 6 mois pour avoir vraiment un avis artistique». C’est pour cela qu’il aime tant la musique classique et particulièrement «La jeune fille et la mort», de Schubert. «C’est ma passion, je réécoute cette œuvre tout le temps».

https://www.ladepeche.fr/article/2018/03/30/2770313-benabar-j-aime-raconter-l-inattendu.html