Raphael: «J’aime bien Bruxelles. C’est joyeux. C’est la fete!»

Samedi 7 juin. Début d’après-midi. Dans un salon de Flagey. On termine une bouteille de vin blanc en compagnie Samuel Benchetrit, Anna Mouglalis et Dominique Duchesnes tandis qu’Alan Parker enchaîne les interviews à l’autre bout de la pièce. Et voilà que Raphaël débarque, une canette de Vedette en main. Très cool, on entame un entretien d’une bonne dizaine de minutes qui tient plus de la conversation débridée que de l’interview traditionnelle.

 

C’est la première fois que vous êtes jury dans un festival de cinéma ?
Non, je l’ai été une fois au festival de Deauville. C’était bien. C’était cool.
Vous attendez quoi du festival ?
Déjà regarder des films, genre deux ou trois par jour, c’est quand même le pied. J’aime bien ça. J’aime bien Bruxelles. C’est joyeux. C’est la fête. J’adore cette ville.
Vous avez une culture cinéma ? Des souvenirs d’enfant ? Ou de sortie en famille ?
Mon premier souvenir, ça doit être Bambi, un truc comme ça. J’ai pas trop aimé parce que j’ai trouvé ça triste. J’ai 5 ou 6 ans. Je me souviens aussi d’un film avec Jean-Paul Belmondo Le Professionnel. Je ne suis pas sûr que c’est regardable aujourd’hui. C’était légèrement raciste à l’époque. Mais bon, j’aimais bien Belmondo, c’était mon héros. Je ne suis pas cinéphile. À l’inverse de mon fils qui n’a que six ans mais qui connaît les John Huston, les John Wayne. Le western, c’est son tropisme. Il peut regarder vingt fois La Prisonnière du désert. Parce qu’on l’a élevé comme ça puisqu’on regarde beaucoup de films.
Avec mes parents, j’allais voirLa guerre des étoiles.
Vous étiez déjà plus musique que cinéma adolescent ?
Oui, mais maintenant, c’est en train de changer. Je trouve qu’il se passe des choses plus intéressantes en cinéma qu’en musique. C’est beaucoup plus créatif. Chaque année, je me prends dix claques dans la gueule. Alors qu’en musique, j’en trouve mais je dois vraiment chercher.
Pour l’instant, quelles sont vos claques musicales ?
Pour l’instant ? J’adore Bombino, un musicien touareg du Nigéria. J’ai d’ailleurs travaillé avec lui pour mon prochain album. On a enregistré pendant deux jours ensemble. Ce sont des musiciens nés ces mecs-là. Lui, il joue depuis l’âge de quatre ans. Il invente encore le son. C’est Keith Richards, plus rock qu’Ali Farka Touré. Comment avoir autant de personnalité en trois notes ? Ça me bouleverse. J’aime aussi Hanni Khatib, même si je suis moins fan de son dernier disque. J’ai fait un duo avec lui pour « Taratata », il a un engagement physique…
Pourquoi dites-vous que le cinéma d’aujourd’hui est plus créatif ?
Je ne sais pas. C’est une impression. Nous, on est des Français. Entre le cinéma et la France, ce n’est pas comme entre le rock et la France. Tu vas demander à Alan Parker s’il connaît des cinéastes français, il va t’en citer cinquante. Les musiciens anglais, ils vont te parler de Jacques Brel et de Maurice Chevalier. Je caricature un peu mais je pense que ce n’est pas loin de cela. Ce n’est pas qu’un problème de langue. Peut-être qu’on est à la fin d’une expression qui vient du rock, du folk et qu’il faut réinventer quelque chose. Et que la réinvention par l’électronique, elle ne me satisfait pas. Je n’ai pas les émotions. Aujourd’hui, un mec peut faire un film avec un iPhone.
Vous aimez jouer dans des films ? Faire l’acteur, comme on dit ?
Je ne l’ai fait qu’à une reprise. Par contre, j’aime bien réaliser. J’ai réalisé des clips, des courts-métrages, j’adore ça. Et j’essaie de réaliser un film pour l’instant, je travaille le scénario…
Vous avez composé la musique d’« Un voyage », le nouveau film de Samuel Benchetrit, présenté lors de ce festival de Bruxelles. Vous aviez des consignes strictes ?
Non. Samuel m’a fait lire le scénario.
La musique est très années 80, Giorgio Moroder. Grosse influence ?
J’adore. Des trucs à la Scarface. La musique qu’il a composée pour Midnight Express est incroyable.
Vous évoquiez votre premier long-métrage… Et ?
Je travaille sur le scénario depuis un an que j’écris avec un scénariste. Qui m’aide beaucoup. C’est un plaisir fou : la mécanique, la création des personnages, la façon dont on malaxe le truc. C’est ma passion depuis un an. Si les planètes sont bien alignées, on tournera quelque chose fin 2015. L’histoire se passe entre Liège et les Ardennes. En gros, c’est l’histoire d’une partie de chasse. Et de copains aussi. Qui sont coincés dans leurs vies. C’est un film sur la violence. C’est compliqué de parler de quelque chose qui est embryonnaire.
Parallèlement à votre premier long, il y a aussi un nouvel album, c’est bien ça ?
Oui, oui, avec les morceaux enregistrés avec Bombino. C’était les premiers jours de studio. Je travaille aussi beaucoup avec David – Ivar de Herman Düne. Le disque devrait être très chanson, très folk. En même temps, on verra, je ferai un truc à la Kavinsky. Non, ça m’étonnerait (rires).
Une petite dernière pour la route. Votre film ultime ?
Sans doute « La nuit du chasseur », que j’ai revu il n’y a pas longtemps et qui est une espèce de truc imparfait mais d’une poésie folle. Parce que c’est un film d’autodidacte. Laughton n’a réalisé qu’un seul film. Je trouve ça fou. Je ne sais pas pourquoi ce film est aussi féerique. J’aime bien le conte au cinéma. Je pourrai aussi citer « Donnie Darko », le premier d’un mec et « Morse » aussi le film danois. Trois films sur l’enfance et l’adolescence.

Propos recueillis par PHILIPPE MANCHE