Comment vous est venue l’idée de la pièce Je vous écoute, écrite avec Hector Cabello Reyes ?
Bénabar : Nous travaillons ensemble depuis longtemps par intermittence sur un tas de projets. Nous partons souvent deux ou trois jours pour travailler. Et le personnage du psy nous a inspirés.
Pourquoi ?
Il y a beaucoup de clichés dont on peut rire autour de ce métier, et puis il y a un huis clos possible dans un cabinet. Le psy, c’est juste un prétexte à la comédie.
Vous vous dites anxieux, phobique… N’auriez-vous pas besoin d’un psy ?
J’en ai vu un pendant un moment. Cela m’a aidé, mais aujourd’hui ça va. Ecrire, ce n’est pas une thérapie. Mais cela fait du bien de pouvoir dire ce que l’on ressent.
Pourquoi avoir choisi Pascal Demolon dans le rôle du mari ?
C’était le moins cher… (Rires.)
Il y a une vraie complicité entre vous sur scène.Etes-vous amis ?
Oui, mais j’avoue que nous ne nous connaissons pas depuis très longtemps.
Quelles sont les répliques que vous préférez ?
J’aime bien celle de Pascal : “Si les huîtres avaient un goût de noisette, les écureuils en mangeraient” ou lorsqu’il déclare avoir écrit des poèmes à son ex avec des rimes en -ule et en -alope.
En quoi écrire une pièce diffère des sketches que vous écriviez pour la série H,sur Canal + ?
Ce n’est pas si éloigné. On a voulu faire une pièce de divertissement avec des portes qui claquent, des gens cachés dans les placards. Cela se rapproche de la sitcom, avec un huis clos et des saynètes.
Et en termes d’apprentissage…
L’humilité d’auteur. C’est-à-dire de ne pas accorder trop d’importance à ce que j’écris, de jeter si ce n’est pas bon et de ne pas s’accrocher à une idée. Cela permet d’avancer, de se tirer vers le haut, de se remettre en question.
Vous sentez-vous légitime en tant qu’acteur ?
Oui. Je me sens légitime en tout. Je n’ai jamais eu le complexe de l’imposteur. Je ne joue pas très bien du piano, mais cela ne m’a pas empêché d’en jouer à Bercy. Il faut être juste lucide. Il y a des rôles que j’ai refusés parce que je ne les sentais pas.
Dans Le Secret d’Elise, la série de TF1, vous incarnez un père, à la fin des années 60, qui a perdu sa fille. Un rôle dans lequel on ne vous attendait pas.
C’est vrai. Cela m’a plu, car c’est un rôle dramatique et le scénario m’a beaucoup intéressé. Je ne fais pas mes choix en fonction de ce qui est bon pour ma carrière, juste au coup de cœur.
Et la musique ?
On a terminé la tournée fin août, et je commence à bosser sur des chansons.
Pourriez-vous en écrire une sur les attentats, par exemple ?
On peut faire des chansons sur tout à condition qu’elles soient de qualité. Il faut avoir vraiment quelque chose à exprimer et ne pas dire des banalités. J’ai beaucoup de méfiance sur les chansons engagées. Voilà pourquoi je ne parle pas politique ou alors avec beaucoup de distance.
Pourtant, vous avez déclaré : “Je suis de gauche.”
C’était avant de gagner du pognon. Maintenant, je suis de droite ! ( Rires.)
Auriez-vous pu être candidat à The Voice ou à Nouvelle Star ?
Oui, si cela avait existé à mes débuts. Je n’ai pas de point de vue négatif. Mais ce sont plus des émissions de divertissement que de réelles émissions de musique. En revanche, je ne pourrais pas faire partie d’un jury. Je ne me sens pas à l’aise pour juger un collègue.
Avez-vous connu une traversée du désert ?
Non, pas encore. Peut-être que ça arrivera… Ça fait partie du jeu. On peut se planter, et ce n’est pas dramatique.
Et si demain tout s’arrêtait, que feriez-vous ?
Après une longue dépression… (Sourire.) Je ne sais pas…
Que pensez-vous du grand retour de votre ami Renaud ?
Je trouve cela super. Je suis même épaté. Il y a un côté phénix. Cela lui fait du bien de chanter.
Vous avez dit : “Dans ce boulot, on peut partir en vrille.” Ça a été le cas pour vous ?
Un peu, mais il n’y a pas eu de gros délires. J’ai toujours fait la java, ça permet de garder une certaine continuité. Je n’ai jamais été très boîtes de nuit, plutôt restos entre copains jusqu’à 4 heures du matin.
Il y a deux ans, vous affirmiez ne pas vouloir renoncer à votre “vie normale”. Y êtes-vous parvenu ?
Je regrette un peu cette phrase. Je pense que je n’étais pas lucide. Je ne mène évidemment pas une vie normale. Je vis confortablement, contrairement à beaucoup, j’exerce un métier qui me plaît, je suis connu. J’essaie de ne pas basculer dans l’outrance. Ce n’est pas quelque chose qui m’intéresse, le côté lunettes de soleil.
Faites-vous attention à votre ligne ?
Je suis devenu coquet. Je fais attention et j’ai un régime que je tente d’imposer à tout le monde : beaucoup de sport, beaucoup de vin, mais pas d’alcool fort ni de drogue.
Après le décès de Michel Delpech , vous avez écrit, sur Facebook, à propos de l’album hommage : “Les affaires continuent, mais sans moi.” Qu’entendiez-vous par là ?
J’étais choqué de la rapidité avec laquelle on parlait de l’album. C’était le lendemain ou le surlendemain de sa disparition. En plus, on y associait mon nom alors que j’étais dans la tristesse. Que des maisons de disques vendent des disques, je trouve ça très bien, mais il aurait fallu laisser une semaine de deuil. Je ne pense pas que cela soit de la cupidité dégueulasse. Les choses sont juste faites dans la précipitation sans se poser de question.
La notoriété vous pèse-t-elle ?
Pas du tout. J’ai une notoriété plutôt sympa. Je peux marcher tranquillement dans la rue… Malheureusement, aucune fille ne me course pour arracher ma chemise !(Rires.)
*Jusqu’en avril à Paris, et en tournée en France à partir de septembre.
Merci à toute l’équipe du théâtre Tristan-Bernard pour son chaleureux accueil.
Cette interview a été publiée dans le n° 557 de Closer.
5 CHOSES QU’ON NE SAIT PAS SUR BÉNABAR
1/ Il se dit toujours intimidé par les personnalités qu’il rencontre, tels Alain Souchon ou Jean-Jacques Goldman
, ou quand il voit “Michel Drucker ou Claire Chazal en vrai”.
2/ Il admet ne pas très bien savoir lire la musique.
3/ Ce grand angoissé a refusé de participer à Fort Boyard. Il se justifie : “Je me serais évanoui dès la première épreuve !”
4/ Il est ami avec le chef Jean-François Piège.
5/ Très nerveux, il lui est déjà arrivé de casser des portes, des ordinateurs et de desceller un lavabo.