«Une société où les enfants sont malheureux est une société de merde !»

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Vous êtes très sollicité, vous acceptez tout ?

C’est vrai qu’il y a tellement de causes à défendre, et elles sont toutes nobles. Elles engagent des gens qui souffrent ! C’est difficile de refuser, mais on ne peut pas s’occuper de tout et s’impliquer sincèrement. Je suis vigilant pour choisir des choses dans lesquelles je pourrai m’investir vraiment. Survoler ou prendre de façon superficielle une cause aussi grave que peut l’être la paupérisation des enfants et des adultes, ce serait honteux.

Vous avez réfléchi longtemps avant d’accepter (la demande a été formulée lors de la soirée Cap 48, NDLR) ?

Non. J’ai accepté très vite. Je n’aime pas la place de parrain. D’ailleurs, souvent je refuse. Je trouve que le terme de parrain d’une opération est un peu prétentieux. Mais, parfois, il faut dépasser ses blocages personnels. Là, en l’occurrence, savoir qu’un enfant sur quatre qui est dans la pauvreté est tellement saisissant, que c’est la meilleure justification pour aider cette action.

Déjà l’an dernier, vous aviez entendu parler de «Viva For Life»…

Oui, plus par le défi des animateurs, que la cause en elle-même, je l’avoue. Ce qui est important, même quand les causes sont dures, sombres ou graves, c’est de les défendre avec joie. La joie est un véritable réconfort pour ceux qui souffrent. C’est quelque chose que j’ai appris en participant aux «Restos du coeur». Il y a une réelle misère, voire une souffrance, mais ça n’empêche pas de faire de la musique. «Viva For Life», c’est un peu pareil. C’est utile et très efficace que l’on défende une cause de façon vivante et joyeuse.

Ne manger que des choses liquides pendant une semaine, vous auriez pu le faire ?

Pas du tout ! C’est pour ça que je suis très content d’être de l’autre coté de la vitre, en étant parrain ! (Rires) Ce n’est pas le défi en soi qui me touche le plus dans l’opération, à vrai dire, c’est surtout le fait qu’on en parle. Et que l’on pense, de façon un peu osée, aux gens qui vivent dans cette situation précaire.

En tant que papa, vous ressentez encore plus ce genre de causes ?

Nous sommes tous sensibles à la misère du monde. Elle est malheureusement tellement large et multiple. Quand on est père de famille – et même quand on ne l’est pas – la difficulté des enfants, que ce soit dans la maladie ou la pauvreté, ça nous touche en plein coeur. Une société qui ne s’occupe pas de ses enfants prouve qu’on a tous échoué ! Ici, un enfant sur quatre n’a pas le minimum pour bien grandir, mais il y a aussi ce problème en France… Je le dis sans détour, une société où les enfants sont malheureux, est une société de merde ! Notre modèle social ne fonctionne pas.

Ça vous révolte que l’Etat ne remplisse pas ses obligations ?

Nos politiciens tiennent des grands discours, mais ce qui compte, c’est qu’ils les appliquent, que ce soit en France ou en Belgique. Quoi de plus terre-à-terre et de plus utile et symbolique que le bien-être des gosses. Honte aux politiques de tous bords et de toutes générations de ne pas avoir réglé ce problème-là.

En tant que chanteur, vous rendez ce que le succès vous a apporté matériellement de façon discrète ou vous l’exposez pour mobiliser ?

L’un n’empêche pas l’autre. Je suis conscient qu’être parrain ne sert à rien en soi, mais ça permet d’ajouter une petite cartouche à cette cause. J’ai une certaine célébrité qui va peut-être être mise à profit pour «Viva For Life», mais ça ne m’empêche pas d’aider d’une autre façon ailleurs. Il y a le citoyen que je suis qui, comme les autres, donne aussi pour des associations.

Votre célébrité est quand même utile pour faire monter les dons…

C’est un ensemble ! J’admets que pour les bénévoles qui travaillent dans l’ombre toute l’année, et pour les gens qui sont touchés par la cause, si on prend l’exemple du «Téléthon» ou «Cap 48», c’est une fête, un spectacle, un point d’orgue, de nous voir. Pour moi, c’est une petite pierre à l’édifice, mais pas plus que les autres actions… Mon implication ne vaut pas mieux que la personne qui va donner 20 ou 30 € à «Viva For Life».

On vous sollicite de plus en plus ?

Malheureusement, il y a des tas de raisons… Il ne faut pas tout faire. Par exemple, cette année, je ne vais pas faire les «Restos du coeur». Je ne veux pas devenir un professionnel des causes. Je suis venu pour «Cap 48» récemment, mais je fais attention à ne pas trop m’exposer. Trop d’exposition peut tuer l’exposition. Et je refuse beaucoup d’événements qui sont pourtant très utiles. Il ne suffit pas de mettre trois chanteurs pour défendre une cause. C’est d’abord, la mobilisation et le fond de la cause. Le chanteur vient juste mettre son petit grain de sel à la fin…

Il y a une différence entre une oeuvre caritative en France et en Belgique ?

Non, c’est vraiment pareil. Le public réagit de la même façon. Tout le monde en parle, mais on est respectueux de la cause. Il y a une noblesse derrière la démarche. Une grande simplicité qui nous touche.

Vous serez sur le «Téléthon» en décembre ?

À l’heure d’aujourd’hui, je crois…

On vous prévient la veille ? (Rires)

Parfois, c’est le cas, et c’est normal ! On vous appelle pour vous demander de passer. Si vous êtes libre, ce soir-là, vous ne pouvez pas refuser. Peut-être que les grandes vedettes, on les retient bien à l’avance. Ce n’est pas mon cas… (Rires)

Entretien : Pierre Bertinchamps