Benabar, le déclencheur d’émotions

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On vous décrit comme quelqu’un d’anxieux et d’angoissé. Sur scène, ça ne se voit pas du tout!

«Je le suis, c’est vrai. C’est peut-être pour ça que certains d’entre nous aiment faire de la scène. Parce que ça permet de montrer d’autres choses de soi. C’est quelque chose d’assez mystérieux, la scène, pour ça. Déjà, c’est assez calibré et tu sais ce que tu dois y faire. Et en même temps, tu n’es pas vraiment dans la vie de tous les jours. Si tu as mal au crâne, dès que tu entres en scène, il disparaît. C’est pareil pour les angoisses existentielles.»

Elle vient d’où, alors, cette anxiété?

«Je crois que déjà enfant, j’étais anxieux. Question de caractère. Mais ce n’est pas quelque chose qui me gène plus que ça. C’est aussi une façon de voir la vie sans naïveté, sans angélisme.»

Vous travaillez avec les mêmes musiciens depuis longtemps. C’est un peu comme une petite entreprise?

«C’est un peu le cas, oui. Même si j’espère ne pas avoir une attitude de patron. Enfin, je l’ai fatalement un peu puisque c’est moi qui embauche les musiciens et que c’est moi qui les vire, au cas où. C’est une partie du boulot qui est un peu troublante, au début.»

Passer d’une toute petite entreprise à une belle PME, vous le gérez facilement?

«Ça va, je crois. Pour l’instant, en tout cas, et je touche du bois. Mais je fais très attention à ce que ça ne devienne pas une grosse entreprise. Les salles sont plus grandes, mais je ne change pas. Ce n’est pas parce que je fais un zénith que je vais partir avec une maquilleuse! Je fais attention à rester dans l’artisanat.»

Vous dites Je n’ai pas envie de quitter le monde des vivants pour entrer dans le monde des chanteurs. C’est joli!

«Merci. Mais il y a un vrai danger à se prendre pour un chanteur dès qu’on commence à avoir sa tête dans le journal. Tu peux facilement rentrer dans un truc à la con, un monde parallèle.»

Pour parler aussi bien des filles, vous avez dû être élevé au milieu de dix soeurs?

«Non, pas du tout. Mais c’est quelque chose que j’étudie de très près depuis quelques années! Et puis, c’est un biais intéressant parce que ça permet de traiter de plein de choses: l’amour, le désir, la paternité. C’est sûrement pour ça qu’il y a autant de chansons qui parlent de ça.»

C’est quoi le plus difficile dans l’écriture d’une chanson?

«C’est surtout d’essayer de déclencher des émotions. C’est ça le grand truc: un sourire, un peu de tristesse, de la nostalgie. Quand ça arrive, c’est très gratifiant.»

Vous terminez vos concerts par Dis, quand reviendras-tu? de Barbara. Pourquoi?

«Parce qu’elle est magnifique. J’essaie de faire une reprise de temps en temps. Ça nous change de mes chansons parce que tout le monde en a marre.»

Vous n’avez jamais l’impression de tourner en roue libre sur scène?

«Si, bien sûr. C’est un écueil difficile à éviter. Il y a de l’improvisation sur scène et j’essaie de changer mes vannes tous les deux mois, même si elles sont bonnes. Sinon, je deviens fou. Mais c’est un gros travail, en tournée.»

Propos recueillis par Isabelle Monnart