Benabar : « J’essaie de ne pas trop sacraliser ce que j’écris »

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VOTRE PARCOURS ARTISTIQUE EST TRÈS ATYPIQUE PUISQUE VOUS AVEZ D’ABORD ÉTÉ ATTIRÉ PAR LE CIRQUE. VOUS RÊVIEZ D’ÊTRE UN ENFANT DE LA BALLE ?
C’est vrai que môme, je voulais être clean, oh pardon pour le lapsus, je veux dire clown (rires), et j’ai effectivement joué de la trompette très tôt, je devais avoir 5 ou 6 ans.
PUIS IL Y A AUSSI CE DUO DE CLOWNS, PATCHOL ET BARNABÉ, QUE VOUS AVEZ FORMÉ AVEC UN COPAIN ET QUI A ENSUITE DONNÉ VOTRE NOM DE SCÈNE, BÉNABAR…
C’était très chansonnier, beaucoup plus que clown. Mais pourquoi Barnabé ? Je ne sais pas, on voulait avoir des noms d’adultes. Puis Bénabar, c’est parce que mon acolyte parlait tout le temps en verlan (son vrai nom est Bruno Nicolini, NDLR).
VOUS AVEZ ÉGALEMENT VÉCU UN PEU AUX ÉTATS-UNIS. C’ÉTAIT POUR L’« AMERICAN DREAM » ?
Non, j’ai simplement refait une terminale à la fin du lycée pour apprendre l’anglais, dans l’Indiania, en plein dans le Midwest. C’est un pays que j’aime bien de l’intérieur. Les habitants de l’Amérique profonde, ils ont leurs défauts, mais j’ai aimé être à leur contact.
TOUJOURS PAS ENCORE CHANTEUR, VOUS AVEZ ENSUITE FAIT VOS PREMIERS PAS DANS LE CINÉMA COMME TECHNICIEN. C’EST VOTRE PÈRE, RÉGISSEUR, QUI VOUS A DONNÉ CETTE ENVIE ?
Oui, c’est sûr. J’ai été stagiaire régie pendant une dizaine d’années puis metteur en scène en passant par la petite porte. L’écriture me plaisait énormément et j’ai pu faire des courts-métrages (dont un, José et Jeannette, primé au festival de Cognac en 1992, NDLR). J’avais financé les deux premiers moi-même.
VOUS AVEZ ÉGALEMENT ÉTÉ SCÉNARISTES POUR « H », LA SÉRIE CULTE DE CANAL PLUS. QUELS SOUVENIRS GARDEZ-VOUS DE CETTE PÉRIODE QUI A FAIT CONNAÎTRE AU GRAND PUBLIC DES HUMORISTES COMME JAMEL DEBBOUZE OU ÉRIC ET RAMZY ?
C’était génial parce qu’on était payés pour écrire des conneries toute la journée. J’étais dans le même bureau que d’autres auteurs comme Omar et Fred ou Bruno Gaccio. Ça m’a appris beaucoup de choses, comme accepter de mettre à la poubelle des scènes sur lesquelles on a bossé quatre heures. Maintenant, quand j’écris une chanson qui ne me plaît pas, je n’hésite pas à la balancer. J’essaie de ne pas trop sacraliser ce que j’écris.
ET PUIS IL Y A VOTRE SEUL GRAND RÔLE AU CINÉMA DANS « INCOGNITO », AUX CÔTÉS DE FRANCK DUBOSC ET DE JOCELYN QUIVRIN, QUI RACONTE L’HISTOIRE D’UN CHANTEUR DEVENU CÉLÈBRE. C’EST UN PEU DE VOTRE PROPRE HISTOIRE ?
L’histoire du copain qui glande à la maison ou quand j’ai démarré dans les bars, c’est du vécu. J’ai pris beaucoup de plaisir à tourner dans ce film, il y avait une complicité forte sur le plateau, notamment avec Isabelle Nanty et Éric Lavaine (le réalisateur, NDLR)
VOUS PENSEZ SOUVENT À JOCELYN QUIVRIN (QUI S’EST TUÉ DANS UN ACCIDENT DE VOITURE EN 2009, NDLR) ?
Oui. Je joue sur scène une chanson qui s’appelle Les Mirabelles, écrite sur lui.
VOUS AVEZ ÉGALEMENT JOUÉ AU THÉÂTRE « QUELQU’UN COMME VOUS » AVEC JACQUES WEBER ET ISABELLE NANTY, IL Y A DEUX ANS. DÉCIDÉMENT, VOUS AIMEZ PRENDRE DES RISQUES…
Il y avait du risque, mais c’était quand même calculé, surtout quand on joue avec des acteurs pareils ! La prise de risques ne me fait pas peur. C’est plutôt de faire des choix pour des mauvaises raisons, comme pour le montant du chèque, qui m’effraie.
LA CONSÉCRATION AUX VICTOIRES DE LA MUSIQUE EN 2007, C’EST LE MOMENT LE PLUS FORT DE VOTRE CARRIÈRE ?
Non. Sans cracher dans la soupe, ça m’a fait plaisir, mais ce qui compte, ce sont les concerts. Le reste c’est un peu de la frime.
LES CHANSONS POPULAIRES QUE VOUS ÉCRIVEZ, COMME CELLE SUR LES RÂTEAUX PRIS PAR LES DRAGUEURS, C’EST DU VÉCU AUSSI ?
Ah oui, toutes ces chansons ont été vécues de près ou de loin. Les râteaux, c’est les musiciens qui me les racontent, moi je suis chanteur, je ne prends plus de râteaux. Non, je déconne ! (rires).
Propos recueillis par Fred Sauron, 
photo par Marine Cornut Photographie.