Bénabar : «Je suis très carriériste!»

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Qui l’eût cru ? Bénabar, champion pour balancer en chansons des histoires débloquantes, a un plan de carrière.
«Oh, très sommaire… Faire des albums et des tournées le plus longtemps possible. J’aime l’idée de réaliser des disques à la manière de conversations interrompues, comme j’envie les longues carrières à la Souchon.»

Le «petit trentenaire» de la chanson française, de passage hier à Genève, frôle les 40 ans. Il garde son côté gavroche, son sourire mi-timide, mi-caustique, et continue de toucher frénétiquement du bois quand on évoque son succès. «Reprise des négociations» (2005) s’est vendu à 1,3 million d’exemplaires: un record dans une industrie discographique bringuebalante.

Cet automne, l’auteur d’«Il y a une fille qui habite chez moi» ou de «Maritie et Gilbert Carpentier» nous revient avec «Infréquentable». Si l’univers bénabaresque a toujours oscillé entre dérision et gravité, cette fois, une sorte d’introspection mélancolique prend le dessus. Rien de tragique, juste une ambiance plus feutrée, moins clinquante, autour de petites histoires sur «les femmes qui pleurent quand elles nous brisent le coeur» ou sur «une bonne petite dépression». Douze chansons, autant d’allers-retours entre sourires et soupirs.

Vous n’êtes pas en train de nous faire une petite dépression ?
Non. Ça va, ça vient. Je suis un peu cyclothymique, comme tout le monde.
Votre album est un peu plus grave. Bénabar a changé ?
J’espère surtout avoir évolué. Ce sont des choix inconscients qui traversent les disques.
On vous qualifie de poids lourd de la chanson…
J’ai du recul. Rien ne prouve qu’«Infréquentable» aura le succès du précédent. Il marchera sans doute moins bien, vu l’industrie du disque qui s’écroule. Mais s’il ne se vend pas du tout, je serai à ramasser à la petite cuillère!
Vous l’aimez autant que les autres, cet album ?
Oui. Mais j’ai un autre regard sur moi et sur lui. Avant, je me disais que si vous n’aimiez pas mon disque, vous ne m’aimiez pas. Aujourd’hui, c’est moins grave. Face aux autres, je ne me résume plus qu’à mon travail.
Vous avez un fils de 4 ans et demi. A-t-il changé votre vie ?
Comme pour tout le monde. Disons que ça ne change rien en surface : je suis toujours aussi con, j’aime toujours faire la foire avec les copains. Mais ça change tout au fond de soi.
Au fond de soi ?
Oui. C’est la première fois qu’il y a quelqu’un de plus important sur terre que moi! C’est dur, non ?
Lors de la sortie des «Risques du métier», vous nous disiez: «Il faut faire attention à ne pas se pourrir la santé.» Comment ça va ?
Je ne m’en sors pas trop mal. J’ai arrêté de fumer. Restent la bouffe et le rouge. Je suis un maniaque de la gastronomie. Je passe ma vie à acheter des revues gastros, j’aime autant un bon steak frites qu’un trois-étoiles. Je fais aussi du sport, du footing, et je ne suis pas devenu chiant pour autant. N’est-ce pas ?

LE MATIN